J’attendais de visiter ce nouveau musée avec grand enthousiasme. Adepte de l’esthétique de cette époque, durant laquelle la Belgique peut se vanter d’avoir été le berceau d’un grand nombre d’artistes, je ne pouvais qu’applaudir l’initiative. J’avais aussi très envie de voir la merveilleuse collection Gillion Crowet qui trouve enfin « l’écrin » tant promis après des années de discussion. Autant vous le dire tout de suite: celle-ci est à la hauteur de mes attentes avec ses pièces Art Nouveau, du mobilier aux verreries en passant par la vaisselle en argent, tout à fait exceptionnelles.
Mais cette visite-là se mérite.
Car ne vous y trompez pas: il s’agit bien, comme son nom l’indique, d’un nouveau musée, et non d’une simple exposition. Il demande par conséquent minimum 2h pour être visité. Le parcours, sur 5 étages, du -3 au -8 (il y a un ascenseur pour remonter) et ses innombrables escaliers offrent une impression oppressante de dédale comme chez Ikéa, et doit être bien incommode pour les personnes à mobilité réduite, qui doivent entrecouper leur visite par la prise d’ascenseurs (au moins 5 fois!)
Cherchez le fil…
Si encore il y avait un fil conducteur clair qui permettrait de s’orienter, mais les thématiques s’enchevêtrent, donnant l’impression d’une certaine frilosité dans les choix scénographiques ou pire, d’être le fruit d’un vieux compromis à la belge qui, à force de vouloir satisfaire chacun, ne contente plus personne.
Un exemple? On croit arriver dans une salle réservée au merveilleux peintre symboliste belge Fernand Khnopff et puis non, soudain, au beau milieu des oeuvres installées dans un ordre, dont la logique, si elle n’est pas aléatoire, ne saute pas aux yeux, devant celle d’un autre artiste.
S’agirait-il alors d’une chronologie des mouvements picturaux? Pourtant non, la salle qui suit contredit cette supposition. Or, comme chacun sait, la structure favorise la mémorisation et donne un sentiment de sécurité. Ici on ressort avec une impression de confusion et d’indigestion, mais également l’envie d’y retourner pour redécouvrir certaines oeuvres choisies.
L’obscurité c’est chic
Suivant très probablement l’exemple de la muséographie contemporaine française, le nouveau musée fin de siècle est à moitié dans la pénombre. Dommage que cette moitié soit justement celle qui occulte les panneaux explicatifs (quand il y en a!) et que, lorsqu’on nous offre la vulgarité de l’éclairage, ce soit pour l’orienter afin qu’il mette en valeur le verre ou le vernis des tableaux en créant des reflets.
La visite se transforme alors en jeu de piste, pour contourner cette lumière malvenue, pour déchiffrer les signatures et les styles, et pour retrouver les panneaux explicatifs proposés à dose homéopathique non pas, comme le voudrait la logique, au début d’une salle dédiée à une certaine thématique mais près d’un tableau qui, pour être représentatif, n’est pourtant pas mis en valeur.
Le musée: un lieu de vie?
L’atmosphère du grand musée parisien (qui semble être le modèle) serait proche si l’absence cruelle de moquette (ou d’ambiance sonore) permettant de couvrir les sons des nombreux visiteurs, ne donnait pas davantage le sentiment de kermesse qu’une sensation de pieux recueillement devant tant de génie artistique.
Peu importe le flacon…
Car enfin, malgré ces nombreux défauts, ce musée vaut la peine d’être vu, ne fut-ce que pour découvrir nos nombreux talents belges, des pièces exceptionnelles et parfois très connues, mais aussi pour voir ces photographies d’une époque révolue, rêver à la vie de ces personnages, méditer sur les avancées technologiques qu’il y eut depuis lors… Dommage qu’on n’ait pas choisi une oeuvre d’un belge d’ailleurs, pour assurer la promotion du musée. Toujours ce sentiment d’infériorité ?
Le musée, situé rue de la Régence, 3 à 1000 Bruxelles (même bâtiment que le musée Magritte) est ouvert du mardi au dimanche de 10h à 17h. Entrée pleine: 8 euros.